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PROCES DE JOEL, L'ORGANISATEUR DE LA GRANDE TRAVERSEE DE L'ATLAS, JUILLET 2001

Je t'accuse d'avoir, au mépris de la barrière biologique des espèces, transformé l'ensemble de l'humanité en blaireau - l'utilisation totalitaire de ce mot n'a pu se faire qu'en violation des droits de l'homme et de la dite espèce - et ce, je le soupçonne, afin d'en récupérer les poils à des fins commerciales - le barbu que tu es méprise le blaireau...

De même je t'accuse d'avoir vainement tenté de nous transformer successivement en mulet, en bourrique et même en chèvre. Certains membres du groupe commençaient d'ailleurs à présenter des signes de mutation inquiétants (Marie et sa chevelure, par exemple) mais surtout les signes d'un développement de l'instinct de troupeau proprement déshumanisant : réactions grégaires, émanation d'odeurs animales, fascination de certaines pour la morphologie sexuelle du mulet... Et ce parce que toi-même étais entrain de te transformer en coq ! (l'accusé réveille le groupe tous les matin par un cocorico strident)

Je t'accuse d'avoir discrédité le mythe du talon d'Achille. Alors que blessé au pied tu semblais devoir connaître la fin tragique du héros, tu t'es lâchement laissé soigner par Marie dont les soins t'ont permis de t'arracher à ton destin... Tu as, de plus, joué de l'ambiguïté du pied et de sa symbolique pour te faire bander par ton infirmière préférée !

Je t'accuse de ne pas avoir pleinement assumé ton rôle de prédateur véhiculé par la légende : tu n'as repris que quatre fois du thé ; tu t'es jeté modérément sur les graines ; et même si tu es resté sauvage sur les beignets et l'ipomée - à l'impossible nul n'est tenu !... - ton instinct semble s'être émoussé : le test de la salopette a d'ailleurs montré un parfait équilibre alimentaire et une modération peu coutumière.

Je t'accuse de nous avoir imposé des cadences infernales - pires qu'à l'usine - d'avoir tout minuté, tout mesuré, d'être un tayloriste de l'aventure ! D'ailleurs, la mesure incessante par GPS procède d'une cruauté mentale inouïe. Même ceux qui pratiquaient le supplice de la baignoire n'annonçaient pas à leurs victimes combien de temps il leur fallait encore passer sous l'eau ! Avec ton complice le pervers berbère Youssef je vous accuse d'avoir rallongé les distances, manipulé les cartes, augmenté les reliefs, asséché les points d'eau et les cascades, rajouté des cailloux sur les pistes.

Je t'accuse d'avoir raconté des histoires destinées à nous faire rire alors que tu savais que seuls nos zygomatiques n'étaient pas perclus de courbatures. D'ailleurs beaucoup n'ont pas ri car heureusement ils ne les comprenaient pas, ce qui a allégé leur fatigue.

Je t'accuse d'avoir systématiquement développé un esprit d'optimisme à travers des formules du genre "c'est le top du top", "c'est du rocher de chez rocher" et :"Elle est pas belle la vie ?!"... Heureusement que l'esprit de résistance de certains a contribué à retarder des départs, à allonger les pauses, à bougonner à l'arrière.

Je t'accuse donc d'avoir tout fait pour que ce voyage soit parfaitement organisé et réussi.

C'est pourquoi, en vertu des pouvoirs qui me sont conférés par le groupe, je te proclame ami public n°1 !...Dès lors, bien que peu partisan d'une justice expéditive, je te condamne à accomplir les peines suivantes :

  • 1. Organiser pendant longtemps encore des randonnées pour les blaireaux;
  • 2. Effectuer toi-même des vacances forcées dans les djebels marocains ;
  • 3. Pratiquer la continence alimentaire, alcoolique, et sexuelle - en particulier avec les animaux. Exceptionnellement ce soir ta peine est suspendue : tu peux donc manger, boire, quant au reste...
  • 4. Nous supporter pendant cette soirée, nous nourrir et nous abreuver...ce dont nous te remercions vivement !

Philippe, au retour de la grande traversée de l'Atlas, juillet 2001


UNE ÉQUIPE ÉPIQUE


Marie Nicole est une dame de coeur, même si elle est peignée comme l'as de pique
Elle agit avec une terrible ardeur
Surtout quand avec sa seringue elle vous pique.
Elle eut cependant deux fois des haut-le-coeur
Quand du M'Goun elle affronta le sommital pic
Et quand, du talon d'Achille, elle découvrit l'horrible puanteur
!

Jean-Luc semble un major des Indes britanniques
Un Stanley, un Livingston, un flegmatique.
Jamais ni son humour ni son calme il ne perdit,
Même si, quelquefois, sa moustache a frémi.
Le M'Goun l'a éprouvé mais point vaincu
Et souvent on a craint de le r'trouver su'l cul !
Il est d'une propreté méticuleuse
Mais il se tache aussi avec soin
Son t-shirt eut souvent recours à la lessiveuse
Et ses couleurs il ne retrouva point !

La Petite Reine n'est pas seulement le surnom de la bicyclette
C'est une grimpeuse à qui l'on ferait du plat
Mais pas question de mettre les mains sur ses cocottes
Car vous risqueriez de la braquer.
Elle n'est pas pour autant chochotte.
À la voir s'épiler on sent qu'elle est coquette,
Et malgré la rusticité jamais elle ne renonça à se maquiller.

Georges répare tout. C'est Mac "Guyveur"
Du scotch - mais sans alcool - c'est pour coller.
Il est près du sol , comme un crapahuteur ,
À l'aise dans son équipement Mac Kinley
Bien qu'agrégé il roule pas sa mécanique.
Pourtant dans les montées il vous fait la nique.
Au milieu des troupeaux et grâce à son bouc
Aux brebis il a su faire admirer son look.

Laurence s'attendait à passer des vacances
Dès le début elle réalisa que ce n'était qu'apparence
Car au bagne elle se crut condamnée :
Sur un mulet, instable, on la força à s'installer.
Des pentes on la fit grimper, à en avoir la nausée,
Mais jamais on ne réussit à lui faire avouer
Qu'à souffrir un grand plaisir en était résulté
Son courage mérite d'être souligné !

Françoise aime la chèvre, le chameau
Et tous les animaux - et même le blaireau -
On l'a vue converser longuement avec un mulet
En espérant lui apprendre l'anglais.
Longtemps j'ai pensé qu'à Youssef elle allait l'enseigner,
Mais le berbère est aussi rétif qu'un mulet !

Line à l'éducation du mulet
Est, elle aussi, très attachée :
Elle tenta de leur enseigner
L'écologie et la gastronomie
Usant de toute sa pédagogie
On la vit leur porter force écorces et épluchures
De melon, d'orange enfin, de toute nature.
Mais aux enfants aussi elle pensa
Et bien souvent à ceux qui mendiaient
Elle passa une bonne avoinée !

Daniel, tel un chevalier est harnaché
Ses genouillères et autres bandes molletières
D'un érotisme torride évoque la guêpière
Quand son pantalon il transforme en short
C'est les filles du Crazy qui tortillent en cohorte !
Ses mollets soudainement découverts
Lui ouvrent les portes de Monsieur Univers.

Luce fut notre dame aux camélias
Car bien souvent et douloureusement elle toussa.
Sa brunité en fait une splendide Traviata
Et son charme, sur nos sens, plus sûrement opéra.

Jean est un fameux baroudeur
Tanné boucané comme un légionnaire
Il a la fière allure du globe "trottaire"
Pour saluer ses exploits faisons lui un baroud d'honneur

De Martial on n'admira pas que le physique
Il sut, tel Orphée, nous enchanter de sa musique.
Souvent on le vit, à la sieste en particulier,
Enseigner à Marie les rudiments d'un instrument
Qui ne charme pas spécifiquement l'oreille
Mais qui, pour le plaisir, est à nul autre pareil !

Ah Marie Claude qu'il est dur de se lever
Et des bras de Martial s'arracher !
Ce putain de coq vient de chanter,
Et notre danseuse n'est pas belle matineuse
Sera-t-elle cependant aussi bonne marcheuse
Qu'elle est voluptueuse siesteuse ?

Youssef
Pour mener un tel troupeau,
Un berger il a fallu trouver
Bien aguerri aux pires bourricots,
Bien patient, bien équilibré,
Bien lent et mesuré,
Et qui puisse faire l'unanimité !
À tous les pas, à toutes les mentalités
Il lui a fallu s'adapter.
Le touriste est un terrain à risques
Mais Youssef est montagnard et berbère :
Son sourire est un redoutable cimeterre
Qui vous désarme le chieur et vous le met à terre
Plus sûrement qu'en l'envoyant au cimetière !

Vous devez ces vers de mirliton à ma Muse : Marie-Laure
Elle m'inspire, elle m'amuse mais aussi elle m'use
Il faut dire que d'elle souvent j'abuse !
Depuis longtemps elle me fait marcher
Et, à la souffrance je suis durement entraîné
Ensemble depuis des années,
On s'en est tapé des dénivelés !
Le plus souvent c'est dans l'amour que je l'ai rencontrée.

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